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Les mots – et les maux – de l’entreprise

François Coulomb – agrégé d’économie et gestion et docteur en sciences économiques et enseignant en classe prépa à l’expertise comptable - signe un petit bouquin de 128 pages bien argumenté, souvent critique et parfois humoristique sur l’entreprise et le management.

Sous la forme d’un abécédaire de plus de cent définitions, de «A» pour « actionnaire », à «Y» pour « yeld management », il traduit, explique, contextualise, le vocabulaire des gestionnaires, des acteurs de l’économie et du « quotidien des entreprises ».

Si l’ambigu « Affaires » vaut deux pages d’explications, « micro-entreprise » tient en deux petits paragraphes…

Florilège.

Alors, peut-on désormais se passer de la « Bourse » ? « Oui si l’on se réfère au petit nombre d’entreprises cotées (seulement 800 en France), au phénomène volontaire de sortie de cote (…) ; non si l’on considère que toutes les grandes sociétés y sont présentes ».

F. Coulomb rappelle que le mot « Cadre » est « un mot bien français » qui « a vieilli ». Il « représente un statut par opposition au mot de manager qui désigne, lui, plus spécifiquement, une fonction ». Et de rappeler que « les organismes statistiques français ne sont même pas tous d’accord sur sa définition » !

Plus loin, en forme de contrepoint, force est de constater que « le recul statistique n’explique pas l’invisibilité du monde ouvrier et l’effacement de tant d’expressions : classe ouvrière, culture ouvrière, exploitation, etc. ; d’autres mots les remplacent, ceux d’opérateurs ou de collaborateurs, car les ouvriers existent toujours. C’est donc bien plus l’identité ouvrière qui est en cause : les ouvriers n’existent plus dans l’imaginaire collectif ». Ce qui n’empêche pas « les rapports de domination dans le travail » de subsister. A la question de l’apparition d’une « nouvelle classe ouvrière », F. Coulomb répond par une autre question : « Que vaut cette classification quand les conditions de travail des employés ressemblent à celles des ouvriers ? »

A l’entrée « Empowerment » « ou autonomisation », l’auteur s’interroge : « Progrès ou vieille ficelle ? » Avant de suggérer, désabusé ou réaliste, qu’il « est alors à ranger dans la boîte, déjà bien fournie, des outils de gestion, qui servent à obtenir toujours plus des travailleurs en y ajoutant le poids d’une adhésion librement consentie »…

Le développement sur la « notation », après des considérations bien nourries par l’actualité, lui permet de constater qu’elle « est devenue un marché juteux (…), oligopolistique et anglo-saxon en ce qui concerne la notation financière ».

L’incontournable « Powerpoint » vaut un coup de griffe à ses « contempteurs », qui « vont jusqu’à souligner l’intérêt de cet outil pour présenter de mauvais résultats financiers ». Grâce à lui, « les mauvais chiffres ne sautent plus aux yeux » !
Les Mots de l’entreprise, par François Coulomb. Presses Universitaires du Mirail, Le Monde du 20-02-12